Parlons des camerounaiseries…

Article : Parlons des camerounaiseries…
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20 mars 2023

Parlons des camerounaiseries…

En ce 20 mars 2023, journée internationale de la francophonie, je partage avec toi certaines expressions du français local camerounais. J’appelle ça les CAMEROUNAISERIES. Elles sont forgées sur la base de certains mots français ou tirées des langues locales.

L’histoire du Cameroun a connu diverses péripéties qui l’ont fait passer de l’influence allemande à l’influence anglaise puis à l’influence française. Bien que dans les expressions courantes au Cameroun, il y ait beaucoup d’anglicismes et même des mots allemands, le français y a toujours une bonne place.

En ce 20 mars 2023, jour de la célébration des 53 ans de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), quoi de plus normal que de te présenter quelques expressions françaises particulières, spécifiques au Cameroun. Et pour rester fidèle à moi-même, je prends soin de lier chaque expression présentée au contexte actuel. Je ne l’avais pas prévu ainsi au départ, mais ne dit-on pas que « tout change et nous devons vivre avec notre temps » ? Voici donc ces camerounaiseries :

Le « djansang »

Tu connais le djansang ? C’est un ingrédient très prisé des camerounais. C’est une toute minuscule boule de couleur jaune, très utilisée dans la préparation du Mbongo’o Tchobi, un plat camerounais originaire des Bassas ; peuple du littoral. Mais quand on dit « Elle/il fait le djansang » , cela ne renvoie en rien à ce repas honorifique. Au contraire, il désigne un homme ou une femme qui de nature noire de peau, a délibérément décidé de changer sa dite couleur de peau.

Tout ce que je peux te dire, c’est de ne jamais changer la couleur de ta peau. Sois en fier quoiqu’on te dise.

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« Gombiste »

Au Cameroun, dès que tu exiges d’être payé avant d’effectuer un travail, on te traite de gombiste. Découlant du mot « gombo », un aliment ou plutôt un légume qui se mange avec plusieurs types de compléments. Si tu arrives au Cameroun et tu dis « donne-moi mon gombo », ton interlocuteur comprendra que tu réclames ton dû.

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« Le piment »

Qui ne connait pas le piment ? Personne ! Qu’il soit vert, rouge ou jaune, il faut faire très attention lorsque tu emploies ce mot dans une phrase au Cameroun.
Parce que chez nous, piment rime avec sexe, prostitution… Oui oui, lorsqu’on dit d’une personne qu’il/elle « vend le piment », c’est que cette personne marchande son sexe pour de l’argent. Les femmes qui le font sont généralement taxées de « pimentières ».

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Comme Alex du Kamer (artiste camerounais d’origine française) dans son album « Muna Mboa » sorti en 2019 (qui signifie enfant du pays), j’espère qu’en 2035, « le djansang, le gombo et le piment » seront redevenus des aliments.

« Tobassi »

C’est le deuxième titre qui s’inscrit dans l’esprit et le thème de cet opus. Le terme Tobassi signifie le charme, l’envoûtement et l’artiste parle de ce charme naturel que le Cameroun lui aurait donné. Il ne saurait s’en débarrasser et répond à la question de Djess Panebo en disant : « Le Cameroun ». L’album est certes sorti 4 ans en arrière mais le Cameroun, lui, est toujours malade. Malade d’envoûtements pas naturels. Les envoûtements sont légions au Cameroun, les uns envoûtent soit pour dominer, soit pour être épousés ou alors pour se venger.

Si tu arrives ici et que tu as un peu d’argent, fais gaffe à toi ! On pourrait t’envoûter, à défaut d’être Suggar daddy ou Suggar mamy.

« Suggar daddy »

Si tu entends ce mot sortant de la bouche d’une jeune fille, ne réfléchis pas trop. Elle parle de sa banque d’argent, de son financeur… Un homme qui pourrait être son père mais qu’elle côtoie et avec qui elle a des relations intimes, tout cela juste pour bénéficier de sa générosité matérielle.

C’est déplorable je sais, ça me fait de la peine de le dire mais malheureusement, c’est la triste réalité. Presque toutes les jeunes filles aujourd’hui ont des Suggar daddy et les jeunes garçons parlent de Suggar mamy.

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« Je wanda »

Voici un autre extrait qui est en droite ligne avec le titre de ce chef d’œuvre d’Alex. Le terme Je wanda est une expression locale propre au contexte camerounais qui est couramment utilisé. Cette expression marque l’étonnement, le constat et l’artiste est étonné du comportement de certaines personnes dans la vie. Être camerounais est un métier plein, lol.

« LOL »

Lol c’est surtout quand tu n’as rien de bon à dire. Enfin, je crois. Puisque quand je discute avec quelques connaissances, il y en a parmi qui me répondent toujours Lol. Même lorsque je demande s’ils ont mangé à midi ou bien s’ils ont regardé le classico, ils vont toujours me répondre Lol quelle que soit la question que je venais de leur poser… Tsuip !

En fait, j’ai fini par comprendre que c’est une abréviation de débarras. Puisque si tu veux vraiment causer avec un prétendant, est-ce que tu vas te contenter de ses Lol ? Est-ce que tu vas prendre le risque de planter votre conversation en plein milieu d’un no man’s lol, alors que tu peux bien lui répondre avec d’autres expressions qui sont, comment dire ça… plus significatives ? Mdr !

« MDR » (Mourir De Rire)

Ceci m’amuse beaucoup. Pas parce que c’est drôle, mais parce que généralement je lis ceci lorsque je viens de balancer une blague qui me paraît amusante. C’est alors là que tu vas voir les gens te répondre avec des Mdr, des smileys, des émoticônes, des images de rigolade, et cætera.

Bref, Mdr me fait beaucoup rire. Les Camerounais ont même transformé ça en « ddl » (die de lap) et les Togolais en « Mkl » (vas leur demander ce que ça veut dire). Mais ce qui me fait vraiment penser que je suis déjà entrain de « ndem », c’est-à-dire d’être hors-sujet, c’est quand on m’envoie des dérivatifs du genre « Ptdr » ou encore « Xptdr ». Pourquoi l’académie des abréviateurs ne pense pas à nous établir un véritable dictionnaire universel, afin que les gens attardés comme moi ne soient plus complètement largués ? Parce que sinon ça va finir dans un jargon que même les enfants qui sont nés pendant les émeutes de février 2008 ne vont plus réussir à maîtriser…

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« C’est mon Crush »

On ne dit plus avoir un petit faible, une admiration ou un penchant pour quelqu’un mais « avoir un crush ». Le mot vient de l’anglais To crush signifie « écraser, broyer », emprunté de l’ancien français cruisir, une des nombreuses variantes de croissir, « rompre, casser, briser, détruire », précise l’Académie française. Comment un mot doté d’un tel sens a pu décrire un sentiment d’attirance ?

« La vie va t’enseigner »

Parce que quand on vous parle, c’est que ooo je maîtrise… Attends, la vie va t’enseigner… Une façon de dire que la vie nous donne toujours des leçons, qu’il faut écouter les conseils et les avis d’autres personnes peu importe ce que l’on fait.

Au final, les CAMEROUNAISERIES sont tellement nombreuses que toutes les énumérer dans un article reste impossible.

Moi, Badal Fohmoh, je préfère les phrases qui sont bien faites, bien construites, et avec zéro faute d’orthographe et de grammaire.

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Commentaires

Ngpartner
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Merci pour ton article! tu as décortiqué avec maestria des expressions de notre quotidien! cool! tu l'as oublié lui! Mdr!

Badal Fohmoh
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Juste à la fin, il y est.